Indemnisation des victimes d’escroquerie au titre du dispositif dit « Demessine », Question écrite n° 10856 de M. Bruno Gilles, Réponse du Ministère des finances publiée dans le JO Sénat du 04/06/2015

 

M. Bruno Gilles appelle l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur les dégâts provoqués par la mise en œuvre peu scrupuleuse du dispositif dit « Demessine ». Celui-ci, institué par la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, concerne l’investissement défiscalisé dans des résidences de en zone de revitalisation rurale (ZRR). Cet investissement devait être initialement réalisé avant le 31 décembre 2002, mais le dispositif a été reconduit jusqu’au 31 décembre 2006. En échange d’une défiscalisation avantageuse, l’acquéreur s’engageait à louer le logement par le biais d’un exploitant de résidence de tourisme pendant neuf ans. De nombreux Français ont ainsi investi dans ce secteur, pensant jouir à leur retraite d’un complément de revenus. Mais il s’avère que ce dispositif a donné lieu, de la part de certains gestionnaires, à des escroqueries dont sont victimes beaucoup d’entre eux. Certes, l’article 92 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, par amendement du rapporteur général de la commission des finances du Sénat, a mis fin au dispositif. Pour autant, les victimes abusées n’en demeurent pas moins dans une situation catastrophique financièrement et psychologiquement. Il lui demande par conséquent quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour mettre un terme à ces malversations et pour que leurs auteurs soient tenus d’indemniser ceux qu’ils ont floués.

Réponse

Le bénéfice des réductions d’impôt sur le revenu au titre des investissements locatifs réalisés dans le secteur du tourisme, prévues aux articles 199 decies E à 199 decies G du code général des impôts (CGI), est subordonné à un engagement du contribuable de louer le logement de manière effective et continue pendant au moins neuf ans à l’exploitant de la résidence de tourisme. En cas de non-respect de l’engagement de location ou de cession du logement pendant cette période, la réduction d’impôt pratiquée est susceptible d’être reprise au titre de l’année de la rupture de l’engagement ou de celle de la cession. En effet, la cession du logement entraîne soit la résiliation du bail, soit sa transmission à l’acquéreur ; dans les deux cas, le cédant ne respecte pas son engagement de location. La rupture de l’engagement peut notamment être constituée lorsque l’exploitant cesse d’être en mesure de prendre le logement en location et qu’aucun nouvel exploitant ne prend le logement à bail dans le délai d’un mois et jusqu’à la fin de la période couverte par l’engagement. Cela étant, il est admis que la période de vacance du logement concerné avant sa location à un nouvel exploitant puisse, dans certains cas de défaillance de l’exploitant précédent, être supérieure à un mois sans toutefois pouvoir excéder douze mois. Ces précisions figurent au BOI-IR-RICI-50-10-20-20120912 publié au Bulletin officiel des finances publiques – Impôts. En outre, afin de protéger les investisseurs confrontés aux défaillances des gestionnaires de résidences de tourisme, l’article 87 de la loi de finances pour 2010 (n° 2009-1673 du 30 décembre 2009) a prévu une exception à la remise en cause de la réduction d’impôt. Ainsi, dans le cas où la candidature d’un autre gestionnaire n’a pu être retenue après un délai d’un an et où les copropriétaires détiennent ensemble au moins 50 % des logements de la résidence, ceux-ci peuvent substituer au gestionnaire défaillant une ou un ensemble d’entreprises qui assurent les mêmes prestations pour la période de location restant à courir, dans les conditions fixées par le décret n° 2011-545 du 18 mai 2011 (Journal officiel du 20 mai 2011). Cette faculté de substituer au gestionnaire défaillant non pas un nouvel exploitant mais une ou un ensemble d’entreprises assurant les mêmes prestations est ouverte aux copropriétaires de la résidence à la condition que la candidature d’un autre gestionnaire n’ait pas pu être retenue au cours de la période de vacance autorisée de douze mois en cas de changement d’exploitant. Cette condition est considérée comme remplie lorsqu’au terme du délai de douze mois, aucun autre gestionnaire ne s’est porté candidat à la reprise de l’exploitation de la résidence ou lorsque les copropriétaires détenant au moins 70 % des appartements de la résidence n’ont pas souhaité signer un bail commercial aux conditions proposées, tenant notamment au montant des loyers, par le ou les candidats éventuels. Ces précisions figurent au BOI-IR-RICI-50-10-30-20120912 publié au Bulletin officiel des finances publiques – Impôts. Enfin, compte tenu non seulement des dérives constatées dans la commercialisation du dispositif et des conséquences préjudiciables qui en résultent pour les investisseurs, dont témoigne l’auteur de la question, mais aussi de l’inefficacité d’une partie de la dépense fiscale qui génère ainsi une offre de logement excédentaire ne correspondant pas aux besoins du marché, l’article 92 de la loi n° 2010-1657 de finances pour 2011 a supprimé, à compter du 1er janvier 2011, l’avantage concerné au titre de l’acquisition de logements en résidences de tourisme, qui devait s’éteindre au 31 décembre 2012, tout en le maintenant par exception jusqu’à cette échéance au titre de la réalisation de travaux dans des logements existants. En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), la taxation des loyers facturés à la société exploitante a pour corollaire la possibilité pour le propriétaire de l’immeuble de déduire la TVA ayant grevé l’acquisition de son investissement immobilier. La disposition prévue à l’article 178 de l’annexe II au CGI, qui prévoyait un reversement intégral de la taxe initialement déduite lorsque la condition de location par un contrat d’une durée d’au moins neuf ans n’était pas respectée, a été supprimée par le décret n° 2009-510 du 5 mai 2009. En conséquence, les investisseurs confrontés à une situation de défaillance de la société gestionnaire de la résidence de tourisme ne sont exposés au risque de devoir restituer la TVA initialement remboursée, diminuée d’un vingtième par année écoulée depuis l’acquisition de l’immeuble, que dans la mesure où les activités auxquelles ce dernier concourt ne seraient, en définitive, plus soumises à la TVA. Ainsi, si les propriétaires parviennent à conclure un contrat avec un nouveau gestionnaire fournissant des prestations d’hébergement répondant aux conditions fixées par le a du 4° de l’article 261 D du CGI, aucune régularisation de la TVA déduite « en amont » ne sera exigible. Il en sera de même si, en dehors du dispositif « Demessine ZRR », les propriétaires décident d’affecter leur appartement à une activité hôtelière ou para hôtelière soumise à la TVA (a et b du 4° de l’article 261 D précité du CGI), c’est-à-dire dans ce dernier cas une activité qui, en sus de l’hébergement, offre à ses bénéficiaires au moins trois des prestations suivantes : petit déjeuner, nettoyage régulier des locaux, fourniture de linge de maison ou réception, même non-personnalisée, de la clientèle. En revanche, si les propriétaires louent à l’avenir leur appartement sous une forme occasionnelle, permanente ou saisonnière de logement meublé ou garni, sans offrir ces prestations, les loyers perçus seront exonérés de plein droit de la TVA. Corrélativement, ils seront tenus de procéder au reversement d’une fraction de la TVA dont ils ont initialement exercé la déduction. Un tel reversement sera également exigible s’ils se réservent la jouissance privative des locaux. Par ailleurs, si le propriétaire cède son appartement et que le cessionnaire l’affecte à une activité locative soumise à la TVA, la cession de l’immeuble n’entraînera ni taxation, ni reversement de la taxe initialement déduite en application du dispositif prévu à l’article 257 bis du CGI applicable en matière de transmission d’universalité. En revanche, si l’acquéreur n’affecte pas l’immeuble à une telle activité, il convient de distinguer deux situations : si la cession de l’appartement est soumise à la TVA, éventuellement sur option du cédant, aucune régularisation de la taxe antérieurement déduite ne sera exigible chez le cédant ; si la cession n’y est pas soumise, le cédant sera tenu de procéder au reversement de la TVA. Ces précisions sont de nature à répondre aux préoccupations exprimées.

 

 

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